noir profond
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noir profond

Par Bambi - 05-05-2008 20:21:54 - 9 commentaires

 

 

Un trou noir est une région de l'univers où se concentre une masse tellement compacte qu'il y règne un champ de gravitation extrême. Si l'on s'exprime en termes classiques, on dira qu'à l'intérieur d'un tel objet, l'attraction exercée sur tout corps est telle que pour y échapper il faudrait acquérir une vitesse supérieure à celle de la lumière (et donc recourir à une énergie infinie). L'impossibilité pour aucun corps matériel, mais aussi pour la lumière elle-même de s'extraire d'un tel piège, après y être tombée, explique l'appellation de trou noir, qui a été donnée à ce type d'astre par John Wheeler, en 1967.

La définition précédente a le mérite de donner à peu de frais une première intuition de ce qu'il advient dans un trou noir. Mais elle reste inadéquate dans la mesure où un trou noir ne peut être envisagé réellement qu'à partir des notions de la relativité générale, autrement dit selon les concepts de la théorie de la gravitation d'Einstein, pour laquelle champ de gravitation signifie courbure de l'espace-temps. Un trou noir sera alors plutôt envisagé comme une région de l'univers où une courbure extrême révèle des propriétés de l'espace-temps spéciales.

A commencer par l'existence d'une limite, une surface sphéroïdale séparant l'extérieur de l'intérieur du trou noir, et appelée l'horizon, ou, mieux, horizon des événements, dont le rayon a lui aussi un nom : c'est le rayon de Schwarzschild

Le rayon de Schwarzschild est le rayon de l'horizon des événements d'un trou noir, c'est-à-dire la distance mesurée à partir du centre du trou noir et au-delà de laquelle rien ne peut s'en extraire. Sa valeur R dépend seulement de la masse M du corps considéré, de la vitesse de la lumière c et de la constante de gravitation G :

R = 2GM/c².

Il est possible, à partir de n'importe quel point situé à l'extérieur, c'est-à-dire dans notre partie d'univers, d'atteindre un point quelconque de l'espace (y compris à l'intérieur du trou noir) en un temps fini. En revanche, si l'on part d'un point situé à l'intérieur du trou noir, aucun itinéraire n'est imaginable qui puisse conduire, en un temps fini, à l'extérieur. L'horizon d'un trou noir ne peut franchi que dans un seul sens. Bien qu'immatérielle, cette surface est ainsi parfois qualifiée de membrane unidirectionnelle. Puisque rien ne sort d'un trou noir, on peut décider d'ignorer tout ce qui se passe à l'intérieur, et ne l'envisager qu'à partir de trois paramètres : sa masse, sa rotation (considérée à partir de son moment cinétique) et sa charge électrique.

Une seconde propriété, plus problématique encore, mérite d'être signalée : dès la formation d'un trou noir, l'accroissement de la courbure de l'espace-temps à l'intérieur de celui-ci ne peut plus aller qu'en s'accélérant. Elle devient donc inéluctablement infinie. L'intérieur d'un trou noir renferme donc en théorie une singularité correspondant en particulier à des densités de matière et d'énergie infinies. Quelque chose qui rappelle la situation dans laquelle devait en principe se trouver l'univers dans son ensemble à la date zéro du big bang et qui pose d'ailleurs un trou noir comme une sorte de big bang à l'envers et localisé. Ici, matière, espace et temps n'émergent plus au voisinage de la singularité, ils s'y engloutissent.

Les diverses caractéristiques des trous noirs sont très déroutantes. Aussi ont-elles longtemps fait douter de l'existence concrète de tels objets.

Même si de grands progrès observationnels ont été accomplis au cours des dernières années, dans de nombreux cas, la prudence voudrait encore aujourd'hui que l'on n'évoque les trous noirs découverts par les astronomes qu'en les affublant du qualificatif de "candidats", car il existe le plus souvent des explications alternatives : certains astres très compacts, il est vrai assez spéculatifs, pourraient aussi donner lieu à des phénomènes largement similaires à ceux qui font normalement distinguer un trou noir. Et il paraît bien difficile de faire un tri dépourvu d'équivoque. Quelques uns parmi eux pourraient prétendre davantage que d'autres au titre définitif.
Il fallait d'abord pouvoir dire comment ils pourraient bien se former. Or, la question se pose différemment selon les différentes catégories de trous noirs que l'on envisage actuellement.
Les trous noirs ordinaires ou stellaires, ont une masse du même ordre que celle du Soleil. Ils correspondent à l'effondrement de la région centrale d'étoiles massives, après leur explosion en supernova. Cela correspond à la famille la mieux connue. Et plusieurs de ces objets ont été répertoriés dans notre Galaxie. Ils ont typiquement des masses comprises entre 4 et 15 masses solaires.

Les trous noirs géants siègent au centre des galaxies, y compris de la nôtre. Leur masse équivaut à plusieurs millions de masses solaires. Leur formation doit probablement être mise en rapport avec celle de la galaxie qui les abrite. Mais les mécanismes n'en sont pas clairs.

Les trous noirs de masse intermédiaire, qui n'on fait en astronomie que récemment, pourraient constituer le chaînon manquant entre les trous noirs stellaires et les trous noirs géants. Selon certaines conceptions actuelles, ils impliquent les fusions successives de trous noirs de petites masses, qui forment ainsi progressivement un objet beaucoup plus gros.

Les trous noirs primordiaux sont des objets plus spéculatifs : il s'agit de reliques jugées nécessaires du big bang, mais dont on ignore s'il en est qui ont survécu jusqu'à nos jours.

La question qui se pose ensuite au sujet des trous noirs est celle de leur détection. Ordinairement, en effet, c'est grâce au rayonnement émis ou réfléchi par un corps qu'on peut l'observer. Or, un trou noir, par définition, ne devrait émettre aucune lumière. En fait un tel astre représente une telle concentration d'énergie, qu'il peut la communiquer à son environnement immédiat, au point de l'échauffer à très haute température, et de le rendre très lumineux. C'est ainsi que pour rendre compte de certains des phénomènes les plus énergétiques que l'on connaisse (sources galactiques X et gammaintenses, quasars...), c'est bien le plus souvent vers des mécanismes impliquant des trous noirs que les astronomes s'orientent.
Représentation d'un trou noir, dans laquelle notre espace
est réduit à deux dimensions. L'introduction d'une troisième dimension
permet de figurer la courbure de l'espace.

A la surface d'un tel astre, le champ de gravitation est immense et donc la courbure de l'espace-temps y est très importante. L'est-elle assez pour donner naissance à un trou noir? La réponse ne revient pas à la relativité générale, mais à la physique quantique. Elle dépend de la capacité d'une étoile à neutrons à stopper son effondrement, grâce à la pression de dégénérescence des neutrons qui la composent. Le seuil au-delà duquel ce n'est plus possible se situerait autour de 2 à 3 masses solaires. Si donc le coeur effondré, laissé à nu par l'explosion d'une supernova est supérieur à cette limite, l'effondrement de l'astre pourrait se poursuivre jusqu'à ce qu'un trou noir naisse. On parlera alors de trou noir stellaire. Comme dans le centre des galaxies, la matière est particulièrement concentrée, il est possible d'imaginer que de tels trous noirs aient pu gober les étoiles et les gaz environnants au point de grossir démesurément, pour atteindre des masses équivalentes à des millions, ou peut-être, des centaines de millions de fois la masse de notre Soleil.

 

Comment voir un trou noir?

On ne peut voir directement un trou noir, mais il est possible d'observer ses effets gravitationnels sur la matière s'aventurant à sa proximité. Tant qu'on ne pénètre pas à l'intérieur d'un trou noir, on a en effet affaire à un objet se comportant gravitationnellement exactement comme astre ordinaire. Si le Soleil, par exemple, était un trou noir, notre planète continuerait de tourner autour de lui exactement de la même façon. Un astronome, situé très loin du Système solaire, et capable de suivre le déplacement de la Terre, alors que le corps central lui resterait parfaitement invisible, pourrait ainsi en déduire malgré tout sa nature.

L'observation directe du déplacement d'un corps visible autour d'un corps invisible (ou du moins autour de leur centre de gravité commun) a fourni aux astronomes un outil de découverte très efficace, dans le cas par exemple de la détection des premières naines brunes, ou des premières planètes extrasolaires. Dans le cas des trous noirs, cependant, cela ne constitue dans la pratique qu'un outil secondaire. Le champ de gravitation intense qui règne à leur voisinage a effet des conséquences autrement plus spectaculaires. S'il existe ainsi une autre étoile près du trou noir, ou même un nuage de gaz. L'attraction du trou noir pourra en happer la matière. Du fait de la force centrifuge, cette matière, ne va pas s'engouffrer directement dans le trou noir, mais former un disque autour de celui-ci, et par lequel elle transitera (Les transferts de matière dans les systèmes binaires). Le gaz du disque, sous forme de plasma de haute viscosité, est très fortement accéléré et comprimé. Il s'échauffera donc davantage - plusieurs millions de degrés - et sera en mesure d'émettre des rayonnements de très haute énergie. C'est cette lumière qui pourra servir de signature au trou noir. 

Longtemps resté théorique le scénario de l'engloutissement d'une étoile par un trou noir géant semble avoir été observé pour la première fois de façon avérée dans la constellation de la Vierge en juin 2003 par les satellites XMM-Newton et Chandra, qui ont détecté un très puissant sursaut X  au centre d'une galaxie double étiquetée RXJ1242.6-1119. Après analyse de l'événement, qui a correspondu à une libération d'énergie comparable à celle d'une supernova, l'explication retenue, publiée en février 2004, aura ainsi été que l'on a bien eu affaire à l'absorption au moins partielle d'une étoile désintégrée par les forces de marées causées par un trou noir supermassif (estimé à cent millions de masses solaires) niché au coeur de cet objet. Ce résultat laisse soupçonner  rétrospectivement que des explications similaires pourraient être données à deux sursauts X très comparables, observés dans les galaxies NGC 4552 et NGC 5905 en 1995 et 1996, respectivement.

l existe d'autres possibilités de repérer un trou noir. La théorie de la relativité générale prévoit notamment que la rotation d'un trou noir entraîne l'espace autour de lui, un peu l'eau entraînée dans un tourbillon. Une première observation de cette distorsion de l'espace pourrait avoir été réalisée, fin 1997, grâce au satellite de la Nasa Rossi X-ray Timing Explorer (RXTE). En suivant, grâce à son émission X, le déplacement de l'axe d'un anneau de matière accélérée par un présumé trou noir. L'intensité du rayonnement variait. Une variation interprétée comme une précession de l'orbite du gaz autour du trou noir, et qui s'explique si l'on admet que la matière est entraînée par l'espace lui-même. C'est l'effet Lense-Thirring, du nom des physiciens Joseph Lense et Hans Thirring, qui avaient imaginé cette possibilité dès 1918. Luigi Stella, de l'Observatoire astronomique de Rome et Mario Vietri de l'université de Rome ont mis Wei Cui, du MIT, sur la voie, en novembre 1996 la possible détection tel effet autour d'une étoile à neutrons, qui est aussi un objet suffisamment dense pour donner lieu au même effet. Là encore, donc un seul argument est insuffisant.

L'évaporation des trous noirs

Parce que rien ne peut jamais s'extraire normalement d'un trou noir et que, dès lors, sa seule évolution envisageable est un accroissement de sa masse (et partant de sa surface). L'accroissement n'est stoppé que faute de matière à gober. Le trou noir alors s'endort, mais ne meurt pas. C'est peut-être d'ailleurs ce qui explique que le centre de notre Galaxie, comme celui de la plupart des galaxies proches semble dépourvue de trou noir géant, à l'opposé de galaxies lointaines et dont nous voyons l'image de ce qu'elles étaient pendant leur prime jeunesse. Ayant fait le vide autour de lui, le trou noir central serait donc en sommeil.

D'un point de vue plus théorique, des physiciens ont évoqué ce qui ne semblait être au départ qu'une analogie entre la l'aire A de l'horizon d'un trou noir et une autre grandeur utilisée en physique qui elle aussi ne peut que s'accroître avec le temps, l'entropie S. Cet accroissement de l'entropie, qui est énoncé par le second principe de la thermodynamique, traduit l'irréversibilité des phénomènes. L'analogie thermodynamique, et l'idée que la surface d'un trou noir peut être décrite comme une membrane, a permis d'envisager d'autres propriétés d'un trou noir, au delà des traditionnelles masse, charge et rotation. En posant l'entropie du trou noir comme proportionnelle avec sa surface et en jouant avec les équations, on attribue ainsi à la surface des trous noirs une viscosité et même une résistance électrique...

On pouvait s'interroger sur l'intérêt de tout cela jusqu'à ce que Stephen Hawking y mêle la physique quantique, et non plus cette fois, là où elle semblait s'imposer le plus, c'est-à-dire au voisinage de la singularité, mais maintenant au voisinage de la surface. Il en a résulté que l'énergie gravitationnelle au voisinage de la surface pouvait être assez importante pour que se créent des particules. La plupart seront englouties par le trou noir. Il quelques une en réchapperont, et donc d'une certaine façon extrairont de la masse et de l'énergie au trou noir. Cette émission de particules, est appelée le rayonnement Hawking. Il explique que les trous noirs s'évaporent avec le temps. Lentement s'ils sont très massifs, mais beaucoup plus vite s'il s'agit de tout petits trous noirs. Par ailleurs, l'idée qu'un trou noir rayonne, justifie que l'on puisse parler de sa température, de son entropie et l'envisager donc en termes thermodynamiques. Les simples analogies initiales auraient donc une signification physique réelle...

 

 

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9 commentaires

Commentaire de Khanardô posté le 05-05-2008 à 21:31:36

Après le billet sur le chaos, tu enfonces le clou, là. Tu bosses dans le milieu de la physique ou de l'astrophysique ? Ces sujets me passionnent, bien que je sois néophyte...

Commentaire de Mustang posté le 05-05-2008 à 21:32:01

le trou noir .......... et si c'était le commencement?

Commentaire de L'Dingo posté le 05-05-2008 à 23:08:11

"En revanche, si l'on part d'un point situé à l'intérieur du trou noir, aucun itinéraire n'est imaginable qui puisse conduire, en un temps fini, à l'extérieur. L'horizon d'un trou noir ne peut franchi que dans un seul sens.".....NOIR C'EST NOIR , IL N Y A PLUS D' ESPOOOOOIIIRRRRRR !!! :-))))))))))))

Commentaire de corto posté le 06-05-2008 à 07:22:42

Salut Bambi,
je sens que tu vas changer d'orientation professionnelle.
Merci pour cette leçon!

Commentaire de Le Lutin d'Ecouves posté le 06-05-2008 à 07:44:54

Je cite :
Après la période de transformation des galaxies et des amas, le phénomène le plus marquant est l'évaporation des trous noirs. La relativité générale décrit les trous noirs comme des corps auxquels rien ne peut échapper, ni la matière, ni la lumière, ce qui implique que leur masse ne peut qu'augmenter avec le temps. Cependant, dans les années 1970, l'astrophysicien britannique Stephen Hawking montra que cette vision n'est pas totalement exacte. Au contraire, un processus quantique qui met en jeu les particules virtuelles peut très bien faire diminuer la masse d'un trou noir.
Imaginons qu'un électron virtuel et son antiparticule surgissent du vide et apparaissent à proximité du rayon de Schwartzschild d'un trou noir. Il est tout à fait possible que l'électron plonge très rapidement dans le trou noir et y disparaisse, mais que son antiparticule réussisse à échapper au piège. Dans ce cas, l'antiélectron virtuel, qui aurait rapidement dû s'annihiler avec son compagnon, n'est plus en mesure de la faire. Il va donc errer un certain temps et finir par rencontrer un autre électron virtuel créé dans des circonstances similaires. A ce moment, les deux particules peuvent s'annihilent et donner naissance à des photons.
Commentaire : Tu ne trouves pas que l'on est là au niveau poétique de la physique ? Le virtuel génère le réel et le noir profond la lumière. N'est-ce pas la définition de ce que nous sommes ?

Le processus précédent conduit, à partir de particules virtuelles nées temporairement d'une fluctuation d'énergie, à des photons bien réels qui possèdent une véritable énergie. Ceci peut à première vue sembler contraire aux lois de la physique car de l'énergie est créée à partir de rien. En fait, Hawking a montré que ce n'est pas le cas. Entre leur création et leur annihilation, les particules virtuelles peuvent entrer dans le monde réel car elles prennent un peu d'énergie gravitationnelle au trou noir. Ainsi, pour ce dernier, le processus se traduit par une légère diminution d'énergie donc de masse, d'où le nom d'évaporation.

Commentaire de Le Lutin d'Ecouves posté le 06-05-2008 à 07:47:09

Excuse la mise en page du précédent commentaire mais l'interface ne permet pas une grande souplesse.

Commentaire de BENIBENI posté le 06-05-2008 à 14:42:57

Ca peut étre aussi de la science naturel, y a toujours un trou noir...Sous un short de Kenyan...

Commentaire de agnès78 posté le 06-05-2008 à 17:25:00

merci nina pour ce post si passionnant

Commentaire de grandware posté le 06-05-2008 à 17:46:59

Evaporation du trou noir... short kenyan... grande souplesse... Que dire ?

Il faut être connecté pour pouvoir poster un message.

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